Dans les écoles de gestion, on parle de réseautage; dans le milieu universitaire, de collaboration. Peu importe le terme employé, si vous n’établissez pas de bonnes relations avec vos collègues, non seulement vous passerez à côté du meilleur d’une carrière universitaire, mais vous ne pourrez pas non plus exploiter une précieuse ressource pour l’avancement de votre carrière.
Entrez dans la danse, monsieur le professeur
Le concept de réseautage semble à des années-lumière du milieu universitaire, où la réputation et l’expertise s’acquièrent avec zèle, au fil d’années de recherches et de publications. Quelle importance le réseautage pourrait-il bien avoir dans un monde où les décisions liées à l’embauche et aux promotions sont prises avec une froide objectivité et après mûre réflexion? Bien plus que le pensent les jeunes universitaires, et cette mauvaise perception risque de faire grandement obstacle à l’obtention d’un premier poste menant à la permanence.
Dans le milieu universitaire, réseautage rime souvent avec favoritisme et déception. Des clichés de poignées de main hypocrites et de distribution de cartes professionnelles ont contribué à bannir le terme réseautage du rituel de la recherche d’emploi dans le milieu universitaire. Mais ce rejet pourrait bien avoir eu pour effet de cacher l’essentiel aux étudiants au doctorat qui entreprennent une recherche d’emploi.
Le système d’enseignement supérieur a toujours eu pour mandat de créer un milieu où les universitaires peuvent se rencontrer, discuter d’idées complexes et créer de nouvelles idées. Aujourd’hui, la structure administrative de la plupart des programmes aux cycles supérieurs encourage la collaboration savante sous forme de séminaires, de supervisions, de soutenances de thèse et de conférences. Tout au long de ses études, le doctorant est bien entouré, et on encourage son développement intellectuel par la participation à ces activités. Mais le cordon ombilical qui le relie au milieu universitaire peut être vite coupé lorsqu’il obtient son diplôme. Ses collègues et superviseurs semblent tout à coup très distants et préoccupés par des questions qui ne le concernent plus. Il s’agit d’une expérience qui en désoriente plus d’un et qui se révèle parfois un obstacle considérable à l’avancement sur le marché du travail.
De petits gestes qui font boule de neige
Greg a vécu cette désorientation à la fin de ses études universitaires. Pour la toute première fois, il n’avait devant lui aucune bourse ou promesse de financement. Son programme, qui l’avait jadis accueilli avec un si grand enthousiasme, semblait peu intéressé par lui maintenant qu’il avait obtenu son diplôme. Après les mois intenses – marqués par une grande pression, mais aussi par beaucoup de soutien – qui ont mené à la soutenance de sa thèse, Greg avait de quoi être troublé. Il avait beau répondre à diverses annonces de poste, il ne pouvait s’empêcher de se sentir anonyme, un peu comme une statistique.
Par un après-midi de découragement, Greg parcourait le dernier numéro d’une revue électronique à laquelle il envisageait de proposer un article et il est tombé sur un article rédigé par un universitaire qu’il avait cité dans sa thèse. Quelques aspects importants que Greg avait mis en évidence lors de la soutenance de sa thèse ne semblaient pas s’y retrouver. Pour la première fois en plusieurs mois, Greg sentait l’isolement se briser et son appartenance à la discipline.
Sans trop réfléchir, Greg a envoyé un courriel à l’auteur pour lui dire qu’il avait apprécié la lecture de l’article, puisqu’il s’était penché sur le même sujet. Il lui a également demandé s’il serait intéressé à connaître son point de vue sur la question. À sa plus grande joie, l’auteur a répondu par l’affirmative. S’est alors instauré un dialogue par courriel, et l’universitaire a invité Greg à donner une conférence sur son campus. Pendant la visite, Greg a rencontré des gens qui se sont montrés intéressés par la direction qu’avait prise sa thèse, et qui l’encourageaient à publier un article dans une revue à laquelle ils étaient affiliés. C’est ce que Greg a fait et, quelques mois plus tard, un des universitaires qu’il avait rencontré a communiqué avec lui au sujet d’un poste à pourvoir. Il croyait que Greg avait le profil de l’emploi. Quant à Greg, il croyait à un coup de chance. Après réflexion, il a toutefois compris que c’était lui qui avait provoqué les choses, et que cette conclusion heureuse ne relevait pas tellement de la chance, mais qu’elle était plutôt le résultat direct du bon vieux réseautage. Universitaire anonyme, Greg a su se faire connaître et faire connaître son travail en entrant en relation directe avec d’autres experts de son domaine.
Les contacts, ça se cultive sans attendre et sans arrêt
Marlene Delanghe, conseillère en orientation aux services professionnels de la University of British Colombia, préfère parler de connexion plutôt que de réseautage, parce qu’elle croit que le mot « connexion » décrit l’activité de façon plus transparente sans évoquer les idées négatives qui se sont greffées au mot « réseautage » au fil du temps. Elle a travaillé avec plusieurs étudiants au doctorat qui, tout comme Greg, ont modifié leurs habitudes pour établir des liens avec des professeurs et des collègues de leurs domaines au moyen de conférences et de courriels. « L’établissement de relations ne se limite pas à une stratégie ponctuelle en cours de recherche d’emploi, explique-t-elle, ce doit être une pratique quotidienne pour créer des relations. » Elle signale que les candidats qui ont réussi à établir de bonnes relations avec d’autres personnes dans leur domaine ont pu accéder à des postes menant à la permanence en aiguisant leurs antennes sociales afin d’être plus sensibles aux règles qui déterminent ce qu’est un comportement social approprié et en demeurant à l’affût des occasions de s’engager.
Anne MacLennan, chargée de cours adjointe en communications et en sciences sociales à l’Université York, croit fermement en l’importance des conférences pour le développement d’une carrière universitaire. « Pour les nouveaux universitaires, les conférences représentent des occasions en or de rencontrer des collègues et de dénicher des collaborateurs en recherche, et, ainsi, de sortir un peu du tourbillon des entrevues. »
En prenant le temps d’entrer en contact et d’établir des relations avec des universitaires de votre domaine, vous établissez les fondations de votre propre réseau de collègues, qui viendra remplacer l’infrastructure que vous offrait l’université. En plus de représenter une ressource de grande valeur pour vos projets de recherche, ce réseau vous renseignera sur le mode de fonctionnement des départements et sur les possibilités d’emploi, sans compter que les membres du réseau pourront un jour servir de références.
Quatre stratégies pratiques de réseautage dans le milieu universitaire:
1) Complimentez en restant authentique : Communiquez avec un chercheur dont vous avez lu les travaux ou auquel vous avez fait référence dans votre thèse, et faites-lui savoir que son travail a été important dans l’évolution de votre pensée. N’oubliez pas de poser une question qui l’encouragera à vous répondre et à ainsi entreprendre un dialogue, et tentez de le rencontrer à l’occasion de conférences.
2) Demandez conseil : Interrogez des professeurs de votre domaine au sujet des universités qu’ils ont fréquentées ou pour lesquelles ils ont travaillé afin de tout savoir sur les rouages politiques, les particularités culturelles et les guerres intestines. Cela vous aidera à mieux déterminer vos attentes et guidera votre recherche d’emploi, surtout si vous devez établir des contacts à l’une de ces universités.
3) Surmontez votre phobie sociale : Si vous êtes effrayé à l’idée d’amorcer une conversation, pensez à vous inscrire à un atelier de réseautage offert par le centre des carrières de votre université – la plupart des établissements en offrent gratuitement. Bon nombre de participants seront des étudiants au premier cycle et l’accent sera davantage mis sur des postes hors du milieu universitaire, mais les principes que vous y apprendrez demeureront utiles et facilement transférables.
4) Fréquentez les conférences : Si vous avez repoussé jusqu’à maintenant votre participation à des conférences, n’attendez plus, et obligez-vous à vous présenter à au moins une nouvelle personne après chaque présentation à laquelle vous assistez. Si vous avez apprécié le conférencier, exprimez-le. Et pourquoi ne pas proposer de poursuivre la conversation autour d’un café ou d’une bière? À tout le moins, notez leur adresse de courriel et reprenez au point un.
quelle horreur. L’hétéronomie dans son plein déploiement: logique du monde commerciale qui enveloppe et défigure celle du monde universitaire. Bref….