Laurent Mottron est professeur de psychiatrie à l’Université de Montréal et dirige le programme autisme de l’Hôpital Rivière-des-Prairies. En dix ans, il aura inclu dans son équipe quatre assistants de recherche, trois étudiants et une chercheuse, tous autistes. Ces individus ont démontré un rendement de même niveau et parfois supérieur à celui des personnes « neurotypiques ».
En entrevue, M. Mottron s’insurge contre l’assimilation de l’autisme à une maladie. « Le modèle de la maladie vient naturellement à l’esprit pour décrire les populations minoritaires. Or, une maladie a un début et une fin, et n’apporte aucun avantage au malade. Ce modèle colle mal à une variation neurogénétique comme l’autisme. Quant on naît autiste, on meurt autiste. De plus, le fonctionnement du cerveau des autistes, s’il les limite dans certaines capacités de communication et d’organisation, leur procure des avantages dans des tâches visuelles et de traitement de l’information écrite. »
Le chercheur poursuit avec une mise en garde. « Je ne dis pas qu’il faut respecter les autistes seulement parce que leur condition apporte certains avantages. Entre un pour cent et trois pour cent de la population est autiste. C’est un groupe considérable, dont une grande partie est bien adaptée, et une minorité présente des difficultés d’adaptation, parfois importantes, comme tout autre groupe humain. Ces gens sont là pour rester. Il n’existe aucune perspective scientifiquement valide de modifier le cours de cette variation. Or, nos sociétés démocratiques avancées soutiennent leurs membres qui présentent des inadaptations, et leur permettent de contribuer à la collectivité. Pourquoi ne le ferait- on pas aussi avec les autistes? Pourquoi ne pas élaborer des méthodes d’éducation visant à tirer le meilleur parti de leur façon particulière d’être, plutôt que de chercher à les transformer en neurotypiques, ce qu’ils ne seront jamais? »
Selon lui, les scientifiques ont une responsabilité importante en ce sens. En mettant l’accent sur les forces des autistes, et en ciblant les conditions dans lesquelles ils apprennent et fonctionnent le mieux, ils peuvent modifier la perception que l’on a d’eux.
L’article de M. Mottron dans la revue Nature se trouve ici (en anglais).