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Les chercheurs postdoctoraux de deux universités se syndicalisent

Leur faible rémunération proviendrait de l’ambiguïté de leur statut

par ROSANNA TAMBURRI | 03 NOV 08

Les efforts de syndicalisation des boursiers postdoctoraux font leur chemin à l’Université Western Ontario et à l’Université McMaster.

La Commission des relations de travail de l’Ontario a récemment permis que l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) représente une trentaine d’attachés de recherche postdoctorale de l’Université Western Ontario, où l’intérêt à l’égard de la syndicalisation se fait sentir depuis plus d’un an. Plus tôt en 2008, une majorité de boursiers postdoctoraux avec droit de vote de l’Université McMaster a choisi d’adhérer au Syndicat canadien de la fonction publique (SCPF). Il s’agirait des deux premiers syndicats de boursiers postdoctoraux au Canada.

« Les chercheurs postdoctoraux estiment se trouver dans une situation précaire », explique Peter Ferguson, ancien chercheur postdoctoral à l’Université Western Ontario, instigateur de la syndicalisation. À son avis, nombre d’entre eux s’estiment sous-payés et en mauvaise position pour négocier un meilleur salaire. « J’ai connu des titulaires de doctorat expérimentés qui touchaient à peine 24 000 ou 26 000 $ par année. »

Qui pis est, avant d’obtenir un poste permanent, ils doivent patienter plus longtemps qu’auparavant. « Dans le bon vieux temps, cette traversée du désert durait deux ou trois ans, après quoi les chances d’obtenir un poste de professeur étaient assez bonnes. » Mais au fil des ans, l’attente n’a fait que se prolonger.

M. Ferguson, qui travaille maintenant comme organisateur local à l’AFPC, s’est présenté comme candidat néodémocrate aux dernières élections fédérales dans la circonscription London-Ouest. Il est un membre fondateur et ancien président de l’association des chercheurs postdoctoraux de l’Université Western Ontario, un groupe de défense d’intérêts qui appuyait la campagne de syndicalisation.

Helen Connell, vice-rectrice adjointe aux communications et aux affaires publiques de l’Université, affirme que l’établissement espère entretenir de bonnes relations professionnelles avec l’AFPC, tout comme avec les autres syndicats présents sur le campus.

Un différend majeur oppose toutefois l’AFPC et la direction de l’établissement en ce qui concerne la classification des chercheurs postdoctoraux. Les quelque 30 attachés de recherche postdoctorale sont considérés comme employés de l’Université, mais environ 200 boursiers post-doctoraux sont considérés comme des contractuels et ne peuvent donc se syndiquer. L’AFPC fait valoir que la majorité de ces derniers devrait pouvoir adhérer au syndicat. L’Université et l’AFPC ont convenu de négocier les critères de classification des chercheurs postdoctoraux.

En avril dernier, plus de 100 chercheurs postdoctoraux de l’Université McMaster (à l’exception de ceux du domaine des sciences de la santé) ont adhéré à la section locale 3906 du SCPF. L’établissement ne s’y est pas opposé. Les négociations de la première convention collective devaient commencer fin octobre.

Aux États-Unis, des chercheurs postdoctoraux prennent également des mesures pour se syndiquer; à l’Université de la Californie, c’est ce qu’ont fait tout récemment plus de 5 000 d’entre eux.

Un groupe national

Pendant ce temps, au Canada, on travaille à mettre sur pied une association de chercheurs postdoctoraux, la Canadian Association of Postdoctoral Scholars (CAPS), un groupe national de défense d’intérêts vaguement inspiré de la National Postdoctoral Association des États-Unis. Marianne Stanford, boursière postdoctorale à l’Institut de recherche en santé d’Ottawa rattaché à l’Université d’Ottawa et présidente de la CAPS, soutient que l’association s’attaquera à certaines disparités entre les universités en ce qui concerne le mode de classification et de rémunération des chercheurs postdoctoraux.

« Nous souhaitons faire front commun pour amener le gouvernement et les organismes subventionnaires à nous reconnaître un statut distinct de celui des étudiants et du corps professoral », précise-t-elle.

Selon Mme Stanford, le Canada compte environ 5 000 chercheurs postdoctoraux.

Depuis peu, leur statut ambigu soulève d’autres sujets de préoccupations en ce qui concerne leur situation fiscale. Dans une lettre adressée à l’Université Laval et à la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, l’Agence du revenu du Canada affirmait que les boursiers postdoctoraux ne sont pas des étudiants, et que leurs bourses sont donc imposables. Toutefois, depuis une réforme fiscale récente, les bourses d’études, de recherche et de soutien ne sont pas imposables. De nombreux chercheurs postdoctoraux reçoivent des bourses de recherche, mais ne payent pas de frais de scolarité.

Mme Stanford affirme que, depuis la réforme fiscale, de nombreuses universités québécoises ont remis à leurs chercheurs postdoctoraux des formulaires d’impôts leur permettant de demander que leur rémunération soit exemptée d’impôt. Plusieurs autres universités canadiennes ont fait de même ou s’apprêtent à le faire, tandis que d’autres n’ont pas reçu de l’Agence du revenu du Canada la permission de distribuer les formulaires requis pour demander une exonération fiscale.

« Dans l’état actuel des choses, certains chercheurs postdoctoraux gagnent moins que les étudiants aux cycles supérieurs avec lesquels ils collaborent en raison de modalités d’imposition différentes », ajoute-t-elle.

L’Agence du revenu a donné diffé-rentes réponses aux universités parce que les établissements classifient les postes de chercheurs postdoctoraux de différentes manières, explique Carole Workman, directrice générale de l’Association canadienne du personnel administratif universitaire (ACPAU). Les universités classifient les chercheurs postdoctoraux comme employés, contractuels ou étudiants, selon les fonctions qu’ils occupent et selon d’autres facteurs.

Mme Workman affirme que l’ACPAU collabore actuellement avec les universités et l’Association canadienne pour les études supérieures afin d’aider les établissements à clarifier et à interpréter correctement les dispositions fiscales pertinentes, à voir à ce qu’ils se conforment à la loi et à savoir dans quelles circonstances les chercheurs postdoctoraux pourraient être considérés comme des étudiants.

Une fois que l’ACPAU aura éclairci la question avec l’Agence du revenu du Canada, les établissements n’auront plus qu’à se conformer aux critères, conclut-elle. « Les universités qui souhaitent être concurrentielles, tout en respectant la loi, devront s’assurer qu’elles répondent aux critères. »

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